Le féminisme selon une « pick me »

Si l’on suit la définition de certains actuels membres du mouvement, je ne suis pas féministe. Pourtant, je considère que si toutes ces femmes qui ne font que proférer “Vive le féminisme” sans agir ont le droit de l’être, moi aussi. Selon mon humble opinion, pour faire partie d’un mouvement, qu’il soit politique ou social, la première étape est d’en être le reflet. Je suis désolée de vous apprendre que déclarer que l’on est acteur du mouvement mais ne faire qu’énoncer des chiffres n’est pas suffisant. Pour faire partie d’un mouvement, il faut véhiculer le mouvement. Prenons pour exemple le mouvement politique communiste. A partir du moment où un homme n’étant pas réellement imprégné des valeurs du mouvement s’est mis à le représenter, le communisme a cessé d’exister. Je ne conteste pas le fait qu’il avait des pensées communistes, mais seulement qu’il n’incarnait pas le communisme et que cela n’a donc pas fonctionné. Et cela s’applique à tous les mouvements.

Vous me demanderez alors “Quand se considérer comme féministe accomplie ?”. Pour être honnête avec vous, je n’ai pas de réponse concrète à cette question. Sincèrement,  je ne pense pas qu’il existe de réponse, et ce, pour la simple et bonne raison que la représentation d’un mouvement est relative. La conception du féminisme est flexible en fonction des aspirations de la personne, de ses besoins, de son expérience, de sa connaissance de l’histoire, de la région dans laquelle elle se trouve, de son âge et de plusieurs autres facteurs. On peut tout de même considérer que, dans l’idéal absolu, un exemple de féministe accompli serait Michelle Obama ou Emma Wattson. Ces deux femmes ont su s’imposer dans leur monde, devenir célèbres, réussir leur carrière professionnelle puis se battre pour la cause féminine. Elles ont su revendiquer les bonnes choses et au bon moment. Mais je me demande bien si une femme n’ayant pas “réussie sa vie”; n’ayant pas la notoriété et l’impact de ces femmes pour une quelconque raison, n’aurait pas le droit d’etre féministe. C’est vrai quoi ! Le succès n’est entre les mains de personne.

Vous me direz ensuite : “Si l’on suit tes propos, seule une petite poignée de personnes pourraient faire entendre leurs idées. Ne pas être parfait ne signifie pas que nous n’avons pas le droit à la parole !”. Eh bien, vous auriez raison. Mes précédents propos n’étaient là que pour vous faire comprendre ce que vous vous permettez de faire subir aux autres. Une féministe ne remplissant pas tous les “critères” ne peut pas se permettre d’exclure une autre femme sous prétexte qu’elle ne remplit pas certains critères importants à ses yeux: Comme le souligne le dicton “Balaie devant ta porte avant de regarder chez le voisin”. Je considère qu’à partir du moment où je suis femme, où je fais ce qu’il me plait à moi, j’ai légitimement le droit de me déclarer féministe, n’en déplaise aux extrémistes ayant une conception immodérément subversive de cette doctrine ou à celles qui expriment leur haine contre la gent masculine sous couvert de féminisme. Je suis féministe car j’ai inévitablement eu à m’imposer, à affirmer mes idées. J’ai forcément eu à prouver que je mérite la place que j’occupe. En quoi une personne ne faisant aucun effort pour faire briller la femme, qui ne fait que partager des stories sur Instagram, a-t-elle plus le droit de se considérer comme partisane de l’émancipation de la femme que moi ?

Je considère, effectivement, la plupart des inégalités comme un manque de respect. Cependant, selon moi, demander le respect est une chose. Demander le respect en le méritant en est une autre. Mais gagner le respect sans avoir à le demander est encore mieux. 

Mon entourage est misogyne; mais pas assez pour que je ne puisse pas leur imposer ce que je désire. Je pense de la manière suivante: en demandant le respect, on admet que l’on ne le possède pas. Crier que nous ne sommes pas respectées revient à crier que nous sommes faibles. En agissant comme si on était respectées, on fait croire (plutôt comprendre) à ceux qui pensent que l’on ne le mérite pas qu’il nous est, en réalité, légitime. Ils s’en rendent compte sans même que l’on ai à leur expliquer.

L’objectif est d’arriver à ses fins; en l’occurrence, ici, d’être considéré à sa juste valeur. La violence et la force n’ont visiblement pas fonctionné. Ainsi, il faut être pédagogue, et ce chacun à sa façon, car à chaque société son talon d’Achille. En ce qui me concerne, j’ai décidé d’adopter leur vision des choses, mais faire ce que je désire. J’ai décidé de rire des blagues sur la place de la femme avec mes amis, mais de gentiment les désigner pour faire la vaisselle aprés le repas. J’ai décidé de m’occuper du linge de mon géniteur tout en m’assurant que les salaires de son entreprise n’étaient pas impactés par le sexe de l’employé. 

La vie est un équilibre. Forcer, insister, fait clairement perdre toute crédibilité à la personne. Pour obtenir ce que l’on désire, réclamer la chose de manière explicite n’est pas l’unique moyen. Ce n’est pas parce que c’est celui que vous avez adopté que c’est forcément le seul. 

Voilà comment, moi, je lutte contre le mépris envers les femmes; je ne hulule pas, je ne m’indigne pas, je fais ce qui me plait. 

En conclusion, nous sommes tous et toutes dans le même camp, que nous le voulions ou non. Nos moyens pour survivre ne sont pas les mêmes. La société n’est rien sans diversité. Certaines femmes prennent la cause à cœur et ne se sentiront légères que lorsque l’égalité absolue régnera. D’autres apprécient la situation car elles y trouvent un confort. D’autres encore restent silencieusement dans l’ombre sous la peur des conséquences d’une éventuelle prise de parole. Moi, j’ai simplement décidé d’apprécier la réalité avec ses qualités et ses défauts, tout en essayant de changer les choses qui me dérangent, et ce à mon échelle. Et aucune femme n’a le droit de m’en vouloir de ne pas avoir adopté le même comportement qu’elle.

Dakir Kanza

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