Pourquoi le Barça peut toujours y croire ?

Depuis maintenant quelques mois, le FC Barcelone est plongé dans un marasme sportif mais aussi politique et économique. La démission du président Josep Maria Bartomeu, la découverte des finances exsangues par la nouvelle direction ainsi que la chute du club dans le classement du championnat sont autant d’événements marquants qui expliquent la situation actuelle de l’institution catalane. Mais cette crise multidimensionnelle semble toucher à sa fin, le Barça aperçoit la lumière au bout du tunnel.

Joan Laporta, symbole du retour d’une direction sérieuse

Joan Laporta avait quitté son poste de président du FC Barcelone le 1er juillet 2010, laissant un club au sommet de sa gloire. Si l’équipe est restée un cador européen jusqu’en 2016, elle n’a pourtant jamais retrouvé son niveau légendaire du début de la décennie. Laporta avait donc conservé, dans la mémoire des supporters du club, son image de dirigeant qualifié et accompli. Son retour à la présidence le 7 mars 2021, n’était donc pas sans rappeler les grandes heures du club. Il s’est entouré de ses hommes de confiance : Rafael Yuste comme vice-président, Mateu Alemany au poste de directeur sportif, Jordi Cruyff en tant que conseiller sportif et Patrick Kluivert pour la gestion de la Masia (centre de formation). Si l’objectif principal de son mandat, la prolongation de Lionel Messi, n’a pas abouti, il a tout de même mis en place de nombreux changements. Laporta a commencé par régler les litiges financiers qui opposaient le club à Neymar et à Enrique Setien pour s’enlever ces épines du pied. La direction a également entrepris un gros chantier d’assainissement des finances en prenant des décisions pour assurer la situation du club sur le long terme. Cette politique responsable s’est notamment traduite par le refus de participer à l’accord proposé par l’entreprise CVC, un fonds de capital-investissement, qui consistait en l’hypothèque des droits télévisés du club sur une durée de 50 ans contre une somme de 300 millions d’euros. Ce contrat était très largement favorable à CVC et la direction catalane a choisi de décliner l’offre pour chercher un accord bien plus avantageux. En constatant l’état catastrophique des finances du club et pour se donner une marge de manœuvre, Laporta a signé un prêt de la banque américaine d’investissement Goldman Sachs a hauteur de 595 millions d’euros sur 10 ans. La différence majeure avec l’ancienne direction est la valeur du taux d’intérêt de cet emprunt : 1,98 %, alors même que Bartomeu signait principalement des accords avec des taux faramineux de 6%. 

Une autre manifestation de cette gestion responsable est la politique austère appliquée sur le marché des transferts durant le mercato estival de 2021. En effet, le club s’est attaché les services de Sergio Agüero, de Memphis Depay, de Dani Alves et d’Eric Garcia sans verser le moindre centime puisqu’ils sont arrivés libres, en fin de contrat. Seul Emerson Royal a été acheté pour la modique somme de 9 millions d’euros en provenance du Bétis Séville pour finalement être revendu le mois suivant à Tottenham contre 25 millions d’euros. Ce refus de payer des coûts de transferts élevés était lié à la volonté d’alléger la masse salariale (somme des salaires et amortissements des transferts) pour pouvoir agir sur le mercato l’été prochain. Les départs de Lionel Messi et Antoine Griezmann ont permis de la réduire considérablement au vu de leurs salaires mirobolants. Enfin, les dossiers en cours sont l’établissement d’un partenariat commercial avec une marque pour changer de sponsor maillot la saison prochaine et la validation du projet de construction du nouveau stade.

L’arrivée de Xavi, un vent d’optimisme

Le 5 novembre 2021, Xavi Hernandez a été engagé pour le poste d’entraîneur du FC Barcelone. Son retour s’inscrit également dans la logique d’idéalisation du passé qui a remis Joan Laporta à la tête du club. C’est pourquoi l’annonce de sa venue a fait souffler un vent d’optimisme dans la communauté des supporters catalans. Le départ de Lionel Messi en août 2021 a bouleversé le projet sportif du club qui se retrouvait alors privé de son cerveau et de sa pièce maîtresse. L’attaquant argentin était le meneur de jeu de cette équipe depuis 2009 et son départ a permis de révéler l’absence de collectif. Les trois premiers mois de la saison ont été catastrophiques sur le plan des performances proposées : l’équipe qui semblait n’avoir aucune organisation logique, était marquée par une défense fragile, une possession stérile et un manque d’offensivité face au but adverse. Au-delà de cette impéritie dans tous les compartiments du jeu, ces mauvaises prestations se soldaient régulièrement par des matchs nuls et des défaites. Depuis un mois et l’arrivée de Xavi, les résultats n’ont pas changé significativement mais c’est assez commun lors du premier mois d’un entraîneur, surtout lorsqu’il doit composer avec un effectif décimé par les blessures (Ansu, Aguero, Depay, Sergi, Braithwaite, Pedri…). 

En revanche, sur le plan tactique, la différence de niveau et de spectacle proposé est très nettement perceptible. Les matchs du FC Barcelone traduisent le début de l’instauration d’un fond de jeu et de la création d’un collectif. Xavi a mis en place un système en 4-3-3, la formation traditionnelle de l’institution catalane, marquant le retour du poste d’ailier qui faisait défaut à cette dernière depuis 2 ans. Le pressing est plus organisé et entraîne la double conséquence de récupérer les ballons haut sur le terrain et d’avorter les potentielles offensives adverses. Si les fragilités défensives sont loin d’être colmatées, on constate néanmoins que la relance est plus propre, ce qui réduit également la quantité d’occasions dangereuses. L’ADN du Barça a toujours eu pour fer de lance sa possession dominatrice, tout part de la volonté de conserver le ballon. Toutefois, il est nécessaire de la considérer comme un moyen et non une fin, c’est que Xavi tente d’implanter. L’amélioration de la possession passe par la dynamisation du jeu : on constate que les passes sont plus rapides et donc plus susceptibles d’atteindre le dernier tiers. Si l’axe n’est pas assez fourni en l’absence d’un meneur de jeu et d’un avant-centre, les ailes le sont davantage. Les offensives débutent soit par une différence créée par les ailiers Abde Ezzalzouli et Ousmane Dembélé, soit par un une-deux avec les défenseurs latéraux, Jordi Alba et Sergino Dest. Une autre arme de l’effectif est la technique et la projection vers l’avant de ses milieux : Gavi, Nico et Frenkie De Jong. Enfin, pour compléter le tableau, Xavi semble avoir fait de la qualité de finition une des priorités de l’entraînement puisque les milieux deviennent plus adroits devant le but. La statistique qui affirme que le FC Barcelone est 2ème du championnat espagnol en termes d’Expected Goals (7ème dans la réalité) est assez révélatrice de l’amélioration du jeu et de l’urgence de se procurer un avant-centre sur le mercato. Dans cette configuration, les préceptes de Xavi pourraient se mettre en place avec succès puisque le travail de création des occasions serait récompensé.

Trouvailles de la Masia, ou les jeunes au pouvoir

Les motifs d’espoir sont nombreux à Barcelone et notamment à travers sa nouvelle génération extrêmement prometteuse issue de la Masia ou du Barça B. A commencer par le poste de gardien de but, les jeunes espagnols Inaki Pena (22) et Arnau Tenas (20) pourraient bien enfiler les gants à la succession de Marc André Ter Stegen lorsqu’ils auront fait leur place dans le XI. Pour ce qui est de la défense, l’uruguayen Ronald Araujo (22) s’est déjà imposé comme le patron de la charnière centrale. Sa rapidité, son jeu de tête et ses relances excellentes en font un défenseur complet et solide qui a tout pour devenir un véritable taulier dans quelques années. Il apporte aussi une force de caractère et une sérénité dans la défense, indispensables pour l’équilibre et la confiance au sein de l’équipe. Eric Garcia (20) est arrivé en provenance de Manchester City et malgré quelques prestations brouillonnes en début de saison, il montre de réelles aptitudes et progresse match après match. Contrairement a Araujo il défend en avançant ce qui pourrait créer une complémentarité entre ces deux profils différents. Pour ce qui est des latéraux, l’américain Sergino Dest (21) et l’Espagnol Alejandro Balde (18) sont tous deux très offensifs : ils exploitent leur vitesse pour délivrer des centres en direction de la surface de réparation. Le premier a d’ailleurs fait sa place dans l’équipe au détriment de Sergi Roberto et a montré ses capacités de dribble.

Le milieu de terrain du FC Barcelone regorge également de jeunes talents, à commencer par Pedro Gonzalez Lopez, dit “Pedri” (18), qui a éclaboussé le football européen de son talent et de sa classe durant la saison dernière et lors de l’Euro. Il fait preuve d’une grande maturité dans le jeu, sait contrôler le rythme d’un match et fournir des ballons millimétrés aux attaquants. Son année 2021 a été récompensée par le trophée Kopa et le Golden Boy, qui désignent le meilleur jeune joueur. Plus récemment, la saison 2021-2022 a révélé au grand public deux autres pépites espagnoles de la Masia : Pablo Paez Gavira (17) et Nicolas Gonzalez (19), surnommés respectivement Gavi et Nico. Ils disposent des mêmes qualités : une technique exceptionnelle, une qualité de projection vers l’avant, et la distribution de passes aussi précises que rapides. Ils sont également très investis dans le jeu: infatigables, ils parcourent le terrain d’un bout à l’autre pour récupérer des ballons et courent en moyenne 13 km par match.

Pour ce qui est des attaquants, la nouvelle trouvaille de l’équipe B est l’ailier marocain Abdessamad Ezzalzouli (20). Pouvant jouer sur les deux ailes, Abde est un dribbleur hors pair qui a déjà fait souffrir de nombreuses défenses de Liga par sa capacité à déstabiliser et faire la différence. Enfin, de tous les futurs prodiges du FC Barcelone, Ansumane Fati (19) est très certainement le plus prometteur et le plus talentueux. Cet espagnol originaire de Guinée-Bissau s’est illustré en championnat espagnol et en Ligue des champions durant l’année 2020 par sa qualité de dribble, de placement et de finition. Ansu a déjà inscrit 17 buts avec le maillot blaugrana et il est considéré comme le successeur de Lionel Messi, dont il a d’ailleurs hérité le numéro 10. Éloigné des terrains durant un an à cause d’une grave blessure au genou, il a fait son grand retour en septembre lors du match contre Levante en entrant sur le terrain à la 81ème minute pour marquer dix minutes plus tard, d’une frappe lointaine et puissante après avoir éliminé deux joueurs. Le talent et l’éclosion de cette nouvelle génération se traduit également à travers les buts puisque les 7 derniers ont été inscrits par des joueurs de moins de 22 ans : Araujo, Nico, Gavi, Jutgla, Jutgla, Abde et Nico.

Un mercato brûlant en vue pour renforcer l’effectif

La dernière preuve du retour prochain du FC Barcelone au sommet se trouve dans les prochains mercatos. Bien qu’il s’agisse ici de formuler des hypothèses quant à des transactions futures et incertaines, il existe de nombreux éléments qui permettent d’y croire. Tout d’abord, ce mercato hivernal a débuté sur les chapeaux de roues pour le club catalan avec la signature du jeune espagnol Ferran Torres en provenance de Manchester City pour la somme de 55 millions d’euros. Ce renfort est capital car le besoin d’un avant centre se faisait urgent. 

A en croire les journalistes spécialisés dans le domaine du mercato, le Barça s’intéresse pour l’instant au meneur de jeu marocain Hakim Ziyech ainsi qu’au latéral gauche valencian José Gaya. Dans le même temps, l’écurie catalane souhaite vendre Ousmane Dembélé, Philippe Coutinho, Luuk De Jong et Samuel Umtiti. Tous ces départs permettraient de dégraisser la masse salariale et d’ouvrir la porte à des transferts bien plus coûteux en été. Le club projetterait de s’attacher les services de l’expérimenté Cesar Azpilicueta et du rapide Nouzair Mazraoui gratuitement lors du mercato estival. A part ces deux recrues en fin de contrat, il est de notoriété publique que le club lorgne sur deux joueurs de classe mondiale : Matthijs De Ligt et Erling Haaland. Pour cela, le président Joan Laporta s’est entretenu à de nombreuses reprises avec leur puissant agent italien, Mino Raiola. Pour ce qui est du défenseur hollandais De Ligt, sa clause libératoire s’élève à 125 millions d’euros mais serait réduite à 75 millions uniquement pour le FC Barcelone. La même somme est demandée par les dirigeants du Borussia Dortmund pour signer leur buteur norvégien, Haaland. Ces deux joueurs seraient les pièces maîtresses du nouveau projet sportif du club. Si ces sommes paraissent trop élevées pour un club endetté comme le FC Barcelone, la direction semble avoir trouvé le moyen de se les procurer au vu de son implication dans ces deux dossiers. 

Malgré une situation actuelle difficile marquée par des échecs, le club semble donc avoir toutes les cartes en main pour redresser la situation et tenter de reconquérir la Ligue des champions dès la saison prochaine.

Foucard Anis

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