Notre pouvoir d’achat est en danger

A chaque nouvel achat la facture augmente faisant mal au portefeuille, nous en entendons parler chaque jour aux informations, dans les journaux, sur les réseaux sociaux… accompagné de chiffres complexes mais, savons-nous réellement ce qui met en péril notre pouvoir d’achat ? 

Tout d’abord, l’inflation est la hausse progressive et perpétuelle des prix d’un ensemble de biens et de services sur le marché calculée par l’Indice des Prix à la Consommation (IPC). Cette croissance des coûts est à l’origine d’une diminution du pouvoir d’achat à l’échelle des ménages mais également de la réduction de la valeur monétaire à l’échelle nationale. Depuis une trentaine d’années, cette inflation était maintenue relativement basse allant de valeurs négatives voir nulles comme entre 2015 et 2016 ou lors de la pandémie jusqu’à un maximum de +4% en France. Cependant, depuis l’été 2021, la chimère d’une économie stable s’est soudainement réveillée et cette inflation est passée de +1.5% en juillet 2021 à +8.5% dans la zone euro en février 2023. Selon Eurostat, les plus faibles taux sont de +4.8% au Luxembourg et +5.5% en Belgique mais, dans la moyenne elle est de : +7.2% en France et +9.3% en Allemagne mais ailleurs, les prix flambent comme en Estonie (+17.8%) et Lettonie (+20.1%). D’après Trading Economics, cette inflation ne s’est pas limitée à la zone euro mais a touché la totalité des pays avec +10.1% au Maroc et +10.4% au Royaume-Uni mais a atteint +102% en Argentine. 

D’où vient cette montée fulgurante des prix ? Quelles en sont les conséquences et comment pouvons-nous en amortir les effets ?

Des causes multiples

Inflation induite par la demande: loi de “l’offre et la demande”

L’inflation causée par la demande est due à un déséquilibre entre l’offre du marché et la demande, qui peut lui être supérieure, créant ainsi une augmentation du stockage et donc des prix de vente afin d’assurer le maintien du chiffre d’affaires. Cela peut concerner une part du marché mais également l’ensemble du marché selon la politique de chaque Etat. En effet, elle peut être budgétaire expansionniste, comme en France, c’est-à-dire basée sur l’accroissement des dépenses publiques ou la réduction des taxes et cotisations sociales pour favoriser la demande en augmentant les salaires. Mais, elle peut également être restrictive lorsqu’il y a une réduction des dépenses publiques ou une augmentation des taxes et cotisations sociales qui font diminuer les salaires net donc la demande, et augmenter les prix.

Durant la pandémie, les demandes d’achat de certains produits ont augmenté comme les produits ménagers, les matériels électroménagers… tandis que d’autres ont diminué tel que les ventes de voitures mais ont considérablement augmenté après la pandémie,  ce qui a fait augmenté leur prix à cause de l’incapacités des chaînes de production à suivre la demande. A titre d’exemple, la Chine avait fermé de nombreuses usines du fait d’une politique Zéro-Covid ce qui a engendré une offre insuffisante alors que la demande a augmenté après la pandémie.

Inflation induite par l’excès de masse monétaire 

Cette théorie dite quantitativiste développée au 19e siècle affirme que la quantité de monnaie en circulation serait à l’origine de l’inflation. En effet, une masse monétaire émise trop importante engendre une augmentation de la demande et des prix. L’exemple très instructif est celui de l’Espagne qui, suite à la colonisation de l’Amérique, a connu une révolution des prix due à un afflux d’or d’Amérique qui a augmenté la masse monétaire et, par conséquent, celle de la demande et des prix de biens ou de services. 

Inflation par les coûts 

L’inflation par les coûts se définit lorsque les charges des entreprises augmentent et que celles-ci répercutent cette augmentation sur les prix de vente pour maintenir leurs activités tout en assurant une rentabilité. L’augmentation des frais peut être due aux importations de produits finis, de biens semi-finis ou de matières premières. La guerre en Ukraine a fortement perturbé le commerce des hydrocarbures (pétroles et gaz),  des céréales (blé) et oléagineux provenant de Russie alors que les besoins étaient augmentés. La conséquence est une décroissance des flux de ces matières premières d’où une difficulté pour les Etats pour s’en procurer ce qui a considérablement augmenté leurs prix, vue la forte demande. L’augmentation des coûts de production à cause des salaires ou du prix de l’énergie a engendré une inflation de +13.7% en février 2023 selon Eurostat. Le risque de l’inflation par les coûts est une spirale inflationniste: l’augmentation du prix d’un produit engendre celui d’autres produits ou services plus ou moins liés, ce qui entraîne une décroissance de la demande et une nouvelle augmentation des prix.

Des conséquences à différents niveaux

Une inflation maîtrisée et donc modérée peut avoir des avantages économiques comme une anticipation des hausses tarifaires qui favorise les investissements, le maintien de taux d’intérêts faibles et de l’épargne réutilisable pour faire du profit. 

Les créanciers (ceux qui font crédit) sont les premières victimes d’une augmentation de l’inflation car la valeur du crédit qu’ils octroient diminue. Le secteur bancaire est le premier à souffrir car, suite à une politique dite d’assouplissement quantitatif entre 2008 et 2022, les taux d’intérêts bancaires ont été baissés pour relancer l’économie en injectant des liquidités. Mais, les retours sur investissement ont été faibles à cause de l’inflation ce qui a engendré des pertes non négligeables étant donné que les organismes auxquels elles ont prêté de l’argent ont généré peu de bénéfices. Les exportateurs, les fournisseurs et les sous-traitants connaissent eux aussi une réelle difficulté à vendre car leurs prix augmentent. 

Mais, les principales victimes sont ceux qui ont des revenus fixes et plus ou moins d’épargne, comme les retraités, dont l’augmentation des coûts diminue drastiquement le pouvoir d’achat.

L’Etat peut être avantagé par l’inflation étant donné que l’augmentation des salaires permet une hausse des taxes et des cotisations sociales. Il y a aussi un risque d’accentuation du chômage dans les entreprises qui font face à une baisse de leurs ventes. De plus, la différence entre les recettes et les dépenses de l’Etat (le solde public) si elle devient négative,  baisse la compétitivité du pays ce qui aboutit à une stagnation voire une récession économique.

Solutions atténuantes

Certains Etats impliqués dans l’énergie nucléaire, comme la France, peuvent amortir les impacts de la hausse des prix des énergies fossiles due au conflit Russo-Ukrainien. De plus, la France possède un bouclier tarifaire c’est-à-dire qu’elle empêche certaines hausses comme celle de l’électricité pour freiner l’impact de ces coûts sur le pouvoir d’achat limité à +15% en 2023 mais ce n’est pas le cas de tous les pays. 

Des politiques fiscales et budgétaires peuvent également freiner l’inflation. En effet, les banques centrales peuvent réduire les liquidités en circulation afin de ralentir l’activité économique et donc de baisser la demande et ainsi augmenter les prix en relevant le taux directeur (c’est-à-dire les taux d’intérêt bancaire). C’est ainsi que la Banque Centrale Européenne (BCE) a augmenté ses taux directeurs le 27 juillet 2022 et le 8 septembre 2022.

Enfin, d’autres solutions secondaires pourraient être envisageables comme la politique de change qui consiste à acheter la devise nationale sur le marché de change ou encore la caisse d’émission qui permet d’asseoir la valeur de la monnaie sur une monnaie internationale reconnue et stable. Il y a aussi le contrôle des prix et des salaires par l’Etat qui pourrait être efficace mais difficilement acceptable par les syndicats.

EN CONCLUSION, l’inflation actuelle a été encouragée par des situations géopolitiques ces 4 dernières années mais également par des conditions qui se sont installées depuis plusieurs décennies. Cette inflation met aujourd’hui en péril notre pouvoir d’achat. Certaines solutions sont envisageables basées sur un contrôle rigoureux par l’Etat et/ou une augmentation des taux directeurs par les Banques Centrales.

Lahfidi Maria

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